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L’Expérience Ultra-Tour du Beaufortain d’Evelyne et JC

31 juillet 2014 vu 1 271 fois Pas de commentaire

Samedi 19 Juillet 2014, 18h30: du portable fusent des pleurs et ce cri de déception : « mais pourquoi avez-vous abandonné?! Vous veniez de passer la deuxième barrière ! Pourquoi ? »
Jordan, le fils de Jean-Claude, grand fan de Killian Jornet et qui « vivait » notre course en direct sur livetrack.me, était aussi déçu que nous.
« Jordan, on n’a pas abandonné, on a été éliminés ! Rattrapés par le serre-file, le responsable en charge de fermer la course ! »
Sommet du « col de la Lauze », kilomètre 53. La sanction est tombée : « il faut songer à vous arrêter, vous n’avez plus de jus, vous n’arriverez pas à passer la barrière horaire dans 18km. »
Une vague de déception nous a envahis, j’ai versé des larmes de rage devant tous ces efforts fournis, pour rien… oubliant au passage que je venais pourtant de craquer dans la montée…
Jean-Claude, plus très en forme non plus, mais battant comme jamais, voulait encore y croire : « Laissez-nous essayer, on est en haut du col, ça va aller mieux, on a fait la partie la plus dure, le reste est roulant, on va relancer… »
Mais le montagnard averti nous a ramenés à la raison et nous a lancé ces mots en guise de bouée de sauvetage : « Vous êtes arrivés exactement à mi-course, ce n’est pas rien ! »
Résignés, nous redescendons lentement avec les bénévoles et un concurrent malchanceux vers « le plan de la Lai » pendant que les souvenirs de notre long périple remontent .

  • Queige, 4hOO, départ à la frontale parmi les 400 concurrents. Notre impatience est à son comble. Mon angoisse aussi !
  • Première ascension difficile jusqu’au « col de la Roche Pourrie », 1500 m de dénivelé sur 10 km, en file indienne…j’ai déjà du mal ! Les 95 kilomètres restants risquent d’être longs…premiers doutes !
  • 5h30, lever du soleil illuminant les montagnes et dissipant mon stress, fraîcheur matinale, paysages éblouissants : c’est la grande forme pour tous les deux !
  • 10h00, une chaleur moite s’installe. Elle fera tant de dégâts dans les troupes que les organisateurs accorderont (généreusement !) 5 minutes supplémentaires à la barrière horaire !  Jean-Claude commence une lutte silencieuse contre son ennemie jurée, s’hydrate, s’humidifie bras, cou et visage, ralentit en montée, accélère en descente ou à la faveur d’un nuage de passage. Ce n’est que de retour à l’appartement qu’il m’a montré l’ampleur des dégâts : partout où ça frotte, la chair est à vif !
  • 1h15, « refuge des Arolles ». Nous sommes très fiers de passer la première barrière du « Cormet d’Arêches » avec 1 heure d’avance. Premier ravito, copieux ; affamée, je me jette sur le Beaufort et la saucisse sèche.
  • 11h35, nous nous lançons dans la deuxième étape avec une certaine appréhension, traversant le secteur de la mythique « Pierra Menta », ces 19 km qui nous ont été présentés au briefing la veille comme « le gros morceau » de la course, la partie très technique de haute montagne avec non seulement ses raidillons et ses passages de crêtes périlleux au « col du Grand Fond » à 2671 m d’altitude, mais aussi la fameuse descente de la brèche de Parozan, toute en pierrier, débutant par une belle pente à plus de 40%, qu’il faut aborder un par un, en se tenant parfois à des cordes. Et nous qui comptions gagner un peu de temps en descente !
  • 16h30, genoux et quadriceps en coton ! il faudrait pourtant relancer ! La deuxième barrière, celle du plan de la Lai, est à 7km, dans une heure et demie. 7km qui sont finalement moins faciles que sur la carte ! Et nous devons aller chercher loin en nous les forces pour arriver (à14km/heure!) à temps. Jean-Claude, 10mn et moi 7 mn avant la fermeture de la barrière ! Un petit exploit qui nous soulage quelques secondes, jusqu’à ce qu’on nous explique qu’il faudra repartir avant la fermeture de la barrière si l’on veut continuer la course. Envolé l’espoir de se « requinquer » un peu, de s’enduire de Nok aux endroits critiques. Aidés par les bénévoles compatissants qui nous ramènent notre sac de change, nous enfilons un T-shirt sec, faisons remplir nos gourdes et attrapons au passage quelques quartiers d’orange.
  • 17h00, nous quittons la barrière, en vrac, frustrés avec le serre-file à nos trousses. A nos côtés, quelques compagnons de route épuisés abandonnent les uns après les autres. Et ce chemin qui recommence à monter !
  • 17h20, rencontre avec un troupeau de Clarines, ces magnifiques vaches rousses avec le lait desquelles on fabrique ici le Beaufort. Impossible de se frayer un passage, il faudra attendre que le berger intervienne. On aurait trouvé ça drôle, si on ne voyait pas le tee-shirt orange du serre file se rapprocher dangereusement.
  • 17h40, nous nous approchons de l’attraction de la course, la nouveauté de l’édition 2014, le « tunnel du Roc du Vent » de 7O m de long, déblayé et rendu praticable par les bénévoles. On nous prévient : il faut sortir la frontale ( rangée au fond du sac, évidemment) et « Monsieur, est grand, il devra baisser la tête vers le fond, avant la sortie ! » Oui mais avant d’arriver au fond, Monsieur et Madame se sont émerveillés de la fraîcheur ambiante, des petites bougies posées ici et là…et Monsieur a oublié de baisser le tête !
  • 17h50, « sonné » par le choc, Jean-Claude, derrière moi, s’arrête et décide de ranger consciencieusement sa frontale, pendant que le serre-file le rattrape et que je presse le pas, espérant que mon compagnon en fera de même. Quelques minutes plus tard, je paie cher cet effort et au détour d’un virage, en apercevant l’un des 5 cols qui nous restent à gravir, je me décourage. Je dois me l’avouer, je suis « cuite » ! Dommage !
  • 20h00, de retour à Queige, nous nous remettons lentement de nos émotions, Jean-Claude a vomi en redescendant dans la vallée et j’étais à peine plus vaillante. Nous dînons, réconfortés par les bénévoles, apprenons le chiffre affolant des abandons, lisons les SMS de soutien et de consolation envoyés par les amis ( merci à vous!) et partons nous reposer avec un petit pincement au cœur mais aussi beaucoup d’admiration pour les finishers qui franchissent la petite arche en bois avec une fraîcheur déconcertante !

Dimanche 20 Juillet, 16h00, nous revenons à Aix, quittant à regret la Station des Saisies, la ville de Beaufort et Queige. Est-ce un effet de l’effort en altitude ? Nous avons déjà bien récupéré et dans la voiture, nous faisons un long debriefing, élaborant la liste de ce qu’il faudrait rectifier si toutefois on retentait l’expérience, un jour.
Et comme il est fort probable qu’on reparte sur l’UTB, pour ses paysages magnifiques, l’accueil chaleureux des gens, et la belle expérience à deux, vous nous croiserez sûrement souvent sur des trails l’an prochain !
Bon été à tous !
Evelyne